dilettante
Proust Sainte-Beuve
« Que les conditions extérieures de la production littéraire aient changé au cours du dernier siècle, que le métier d’homme de lettres soit devenu chose plus absorbante et exclusive, c’est possible. Mais les lois intérieures, mentales, de cette production n’ont pas pu changer. Un écrivain, qui aurait par moments du génie pour pouvoir mener le reste du temps une vie agréable de dilettantisme mondain et lettré, est une conception aussi fausse et naïve que celle d’un saint, ayant la vie morale la plus élevée pour pouvoir mener au paradis une vie de plaisirs vulgaires. On est plus près de comprendre les grands hommes de l’antiquité en les comprenant comme Balzac qu’en les comprenant comme Sainte-Beuve. Le dilettantisme n’a jamais rien créé. Horace même était certainement plus près de Balzac que de M. Daru ou de M. Molé. » (PROUST, Marcel : « Sainte-Beuve et Balzac », 1909, Balzac, Mémoire de la critique, Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 1999, p. 470.) Le critique combat le dilettante comme génie intermittent : étincelle figée qui s’oppose à la construction diachronqiue d’une œuvre.